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À Paris, un authentique « sabo » offre
une expérience contemporaine scénographiée de l’art de vivre japonais.

 

Amateurs d’expériences nouvelles, curieux de découvrir la culture japonaise autrement que par les sushis ou les films de samouraïs, avides de calme, de simplicité et de raffinement, voici un nouveau lieu idoine, confirmant l’ancrage du Japon à Paris. Tandis que pour la première fois le guide Michelin a décerné trois étoiles à un cuisinier japonais (Kei Kobayashi, installé près des Halles) dans son édition 2020, un espace concept dédié à l’art de vivre nippon a ouvert ses portes début janvier.

Son fondateur, Shinichiro Ogata, architecte et designer japonais de renom (son restaurant à Tokyo, Yakumo Saryô, est légendaire), a choisi une ancienne manufacture au sein d’un hôtel particulier du XVIIe siècle dans le Marais pour créer un lieu unique, dédié à la culture traditionnelle déclinée de manière contemporaine, scénographié selon une esthétique minimaliste. Chaque centimètre carré, chaque meuble a été pensé et dessiné par Ogata, jusqu’à la vaisselle jetable en bambou. Une tendance jupitérienne ? Le chef préfère parler de démarche « holistique ». En tout cas, le résultat doit être parfait. Tant pis si le chantier a pris des mois de retard. Un perfectionnisme sans faille, une radicalité, à l’image de l’architecture intérieure et de l’ambiance, tamisée et ouatée, entre rigueur monacale et refuge de luxe. Des matériaux issus d’un savoir-faire artisanal, bois, verre, pierre, cuivre, laiton. Des murs et des plafonds blancs couverts de plâtre shikkui (mélange de chaux et de poussière de coquilles d’œufs). Ici, on ne parle pas, on murmure et le téléphone portable est banni.

Le lieu est aussi une invitation à ralentir.

De toute façon, il faut du temps pour parcourir les quatre niveaux répartis sur 800 m2, les trois boutiques (thé, pâtisserie/wagashi, arts de la table), la galerie, le bar, le restaurant et, pièce phare de l’ensemble au sous- sol, l’espace dédié qu’il ne faut surtout pas appeler vulgairement « salon de thé » mais « sabo ». Car pour Shinichiro Ogata, le thé est la pierre angulaire de l’esprit : tout commence, se développe et nit avec ce breuvage quasiment mystique. Toute une philosophie qu’on éprouve lors de la cérémonie du thé. Dans une salle voûtée, en clair-obscur, autour d’un comptoir en bois brûlé, et dans un silence respecté, le maître de thé, venu spécialement du Japon, propose de déguster un « thé d’ombre rare ».

Et là, une véritable chorégraphie se déploie sous nos yeux, chacun de ses gestes est réalisé avec la plus grande minutie, sa main danse littéralement pour attraper la baguette en bois hishaku surmontée d’un petit récipient qui va servir à prendre un peu d’eau pour la verser sur le thé puis dans les verres, et ce, de façon répétée. Rien n’est laissé au hasard et rien ne sera perdu, ni le temps d’infusion ni les feuilles que l’on nous sert à manger pour finir. Quatre décoctions du même gyokuro à températures variées plus tard, on remonte l’escalier rasséréné, prêt à retourner dans l’agitation urbaine, avec les mots de Shinichiro Ogata : « L’hospitalité, c’est une attention particulière tout juste perceptible. »

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Texte Caroline Broué Photographie Angèle Châtenet

 

OGATA. 16, rue Debelleyme, Paris IIIe.

 

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